L'histoire du café et son arrivé en Martinique.

Il y a quelques années, je me suis intéressé au café, au point d'en rechercher matériellement mon Graal: le Typica d'origine, premier café planté par les occidentaux, grand-père de tous les arabicas du nouveau monde.
Cette véritable chasse au trésor, autant dans les livres anciens que les forêts tropicales m'a occupé plusieurs mois.
Je souhaitais à l'époque démarrer une plantation aux Antilles avec un produit de qualité, un peu comme le projet initial autour du bourbon pointu de la Réunion.
J'ai échoué dans mon aventure, sans regret, mais j'ai découvert une île extraordinaire et je suis sûr que ce projet renaîtra.




L'histoire du café et son arrivée en Martinique

De nos jours on trouve du café de toutes origines mais il est difficile d'imaginer qu'après la découverte de ce breuvage en Europe au XVII ème siècle, il s'est passé plus d'un siècle pour que les grandes puissances commerciales européennes puissent en contrôler la production dans diverses parties du monde.
Pendant le premier siècle, malheur à celui qui en possédait des graines fertiles. L'Empire Ottoman punissant de mort quiconque voulait en faire commerce.
C'est grâce à l'habileté de quelques marchands hollandais que plusieurs plants furent récupérés pour être implantés à Batavia (Jakarta).
Deux de ces plants furent envoyés au jardin botanique d’Amsterdam.
Le Bourgmestre de cette ville, connaissant l'attrait pour le café de la cour royale française les fit offrir au roi Louis XIV, Grand maître du monde, qui les fit mettre en serre au Jardin des plantes par Monsieur de Jusieu vers 1710.
Hélas, sans le développement attendu, et bien peu de fruit.
Un jeune capitaine, revenant des Antilles françaises, Gabriel de Clieu, se piqua de l'idée d'en essayer l'implantation à la Martinique.
Il réussit à persuader le roi et embarqua avec deux arbrisseaux sous cloches de verre sur un navire en partance pour l'île en 1720.
Tempête, pirates, manque d'eau et de vivres émaillèrent son incroyable voyage. L'un des plants mourut de soif et du sel, quand l'autre sauvé des griffes d'un marin voulant le jeter par-dessus bord, l'accusant de tous les maux, était remonté sur le pont tous les jours par ce curieux capitaine qui l’arrosait de sa ration d’eau personnelle.




Il faut imaginer l'enjeu et la vision de cet homme.
Son intuition, sa connaissance de la terre.
Arrivé à St Pierre, de Clieu monta à la Jacquard, sa propriété sur le haut du Prêcheur, et planta l'arbrisseau.
L'endroit est idéal, à l'ombre de la Montagne pelée, sur un plateau un peu aéré et humide, en altitude.
Il le fit surveiller jour et nuit, l'entourant d'une grille pour éviter bêtes et personnes mal intentionnées.
Deux ans plus tard, l'arbre donna ses premières cerises.

Deux grands seaux furent distribués avec parcimonie a quelques moines et amis, en secret, avec pour objectif que chacune de ces cerises devienne un caféier.
En 1723 c'est la réussite du projet, les petits plants sont vivaces, la Martinique va rentrer dans l'histoire.

50 ans après près de 20 millions de plants ont été disséminés partout sur l'île, qui devint le premier producteur mondial de café.
Difficile d'imaginer aujourd'hui alors que la production locale est nulle, et que seuls restent quelques plants pays, que les plus grands cafés des Amériques ( par exemple le blue Mountain) sont des descendants de l'arbrisseau du capitaine de Clieu.

Mais souvent, qui dit descendance dit dégénérescence, et retrouver la source de ce TYPICA, c'est retrouver le creuset des arômes.

De Clieu a connu son heure de gloire, avec cette réussite économique pour la France, le Roi l'a fait gouverneur de Guadeloupe et il a effectué une brillante carrière.

Mais qu'est devenu ce premier TYPICA ?



Parcequ'il se fait tard je vous conterai  cela au prochain épisode, et si vous y trouvez quelques vérités historiques à redire, n'hésitez pas. C'est de mémoire après 5 longues années d'oubli que j'écris cela, je n'y mets point de malice.
( Merci à Crémoso pour son aide)

Premier épisode lu avec grand plaisir, j'attends maintenant la suite avec attention

Dommage que tu ne sois parvenu a faire ce que tu voulais
Qu'est ce qui t'a fait echouer?
De ne pas retrouver les plants ou d'autres soucis plus materiels?

La suite !!
la suite !!
La suite !!

et ouiiii ! La suite !

Je vous dois plusieurs précisions, d'abord sur l'orthographe de cet aventurier à qui l'on doit beaucoup.
Originellement DESCLIEU, on le retrouve petit à petit orthographié des Clieux, puis de Clieu.
Il s'agît du même personnage, mort dans son château de Erchigny, en Normandie, près de Dieppe.



Il ne reste helas de ce monsieur que peu de traces, un jardin à fort de France, en Martinique, porte le nom DESCLIEU, une course de chevaux , le prix de Clieu, et une rue, aussi à dieppe, ainsi qu'un remorqueur qui rappel que cet homme a passé beaucoup de temps sur les bateaux, entre la caraïbe et la France.



Pour ceux qui veulent connaître l'épilogue, avant que je le conte, comme le dit à plusieurs reprise Pootoogoo et son histoire de l'espresso, les idées naissent  souvent en même temps chez plusieurs personnes, et ce qui fut ma quête, à été relancé et sera très  bientôt une réalité....

J'espère simplement que ceux qui travaillent sur ce projet donnerons à ce café le nom «De Clieu » qu''il mérite.

Ma vie est guidé par mes passions.
J'ai un métier extraordinaire, qui me comble déjà.
J'ai en plus une passion pour la photo...
J'ai renoncé a le plantation par amour d'une belle martiniquaise qui avec justesse, à su me faire garder raison.
Mais chaque pierre, chaque discussion aura permis l'aventure, et j'ai plaisir aujourd'hui à savoir ce projet sur le point d'aboutir.

Si c'est pas beau tout ça ! L'amour est plus fort que le café, à n'en point douter !
Ne sont-ce pas des japonais qui tentent actuellement de réintroduire le typica, plutôt du côté de la guadeloupe ?
Merci pour le topo en tous cas.As tu finalement trouvé des descendants proche du plan originellement importé ?

Belle histoire

Merci pour cette belle contribution.

Il me semble que mon collègue Michel a aussi une passion pour ce personnage et cette histoire.

J'ai vu récemment un arbre généalogique des variétés de café (dans le livre "Caféologie" de Gloria Montenegro et Christina Chirouze)... je n'ai pas vraiment retrouvé l'équivalent à partager mais quand on le compare à la répartition géographique et historique de ces espèces, on se dit qu'il y a certainement un tas d'histoires fascinantes à raconter. On attends la suite.

J'ai remis la main sur la carte.


[Credit: Speciality coffee Association]

Géniale cette carte

... et quelque chose qui se rapproche de la figure du livre "Caféologie" (manque les lieux et les dates):

J'en ai une à poster aussi, faut que je remette la main dessus.
Mais je voulais justement faire un post spécial variétés, avec toutes les infos sur chaque variétés mais de notre point de vue ! C'est à dire uniquement les variétés que l'on a dégustée, et ce qu'on peut en dire !

Mais qu'est devenu ce premier TYPICA ?

Quiconque arrive en Martinique, l'ile au fleurs, aura bien du mal aujourd'hui à croire qu'elle fut le premier producteur mondial avec près de 400 000 tonnes en 1780.




Helas, un siecle après il ne reste plus en 1893 que 216 habitations cafeières sur 500ha qui ne produisent que 8723 tonnes.

Pourquoi l'Arabica Typica premier café produit en grande quantité par la France a t'il disparu de Martinique?



Dès 1820 les politiques se posent la question.
une multitude de facteurs semblent avoir joué.

Le premier est l'appauvrissement extrêmement rapide des sols ainsi qu'une érosion vertigineuse des parcelles cafeieres.

Ensuite vient la maladie, notamment la rouille et les insectes qui se régalent de ces cerises et en empêche la croissance.

On note partout une dégénérescence des arbres, notamment dut à la pratique de l'etêtement de l'arbre.

Enfin les conditions économiques et politiques ruinent les habitations.
Le contrôle de l'ile par les anglais puis L'affranchissement des esclaves en 1849 fait que l'entretien des parcèles est abandonné pendant de longues années.




le cout de grace sera donné par la culture de la canne à sucre, plus resistante, qui dès le debut du XIX eme siecle representera une solution plus rentable et plus simple pour les habitations.

Très bon !

Voici deux autres "tableaux" des variétés, dont l'un dans le temps.

Pour ta quête de la plante originale peut-être faut-il retourner aux origines de la plante et de l'invention du breuvage qu'on appelle aujourd'hui café, dans la péninsule Arabique
Interroger des Yéménites et des Arabes sur l'histoire des premiers plants..
Ils pourront certainement t'aiguiller

Super sujet !
Je ne débarque que maintenant dans le sujet mais j'ai plus de grains à moudre maintenant qu'hier ! Et j'en aurai plus demain !
Comme @Pootoogoo l'a relevé, je me passionne pour ce personnage et j'y travaille maintenant depuis 4 ans. Je ne peux pas en dire beaucoup car pour le moment je compile un maximum d'informations desquelles je sortirai un, j'espère, long récit.
Pour l'instant, j'ai près de 3Go de données issues d'archives, de livres et notes diverses (ça ferait quelques dizaines de kilos de papiers ^^)
La dedans, j'ai retrouvé le portrait original de De Clieu:

Notez le trait plus précis et l'air plus malicieux que la reproduction que nous devons à sa descendante.
Je sais que De Clieu était en France de juin 1719 à décembre 1720. Il est admis qu'il  était reparti le 8 octobre 1720 Mais c'est dû à une erreur d'interprétation des dates dans les archives. Ici, son autorisation à embarquer :

On y voit un courrier daté "24 9bre 1720". On en a déduit 24 septembre alors qu'il faut lire 24 novembre. L'autorisation daterait donc d'après le départ théorique ! Et le journal de bord du Dromadaire (le nom du bateau) établit un départ au 15 janvier 1721, ce qui rééchelonne tout !
Voilà pour le moment, j’espère pouvoir vous en dire plus bientôt. Enfin... avant l'année prochaine  
Au plaisir d'échanger @Jepp, peut-être as-tu des informations que je cherche ?!!!