70 ans de nostalgie [Gaggia Gilda I]

Mi cyclothymique, mi nostalgique, j'ai tendance à me consacrer à fond à un sujet, puis à le délaisser sans vraiment l'oublier. Comme une graine dont on extrait toute l'essence et dont on garde longtemps le goût en bouche. Cela vous évoque-t-il quelque chose?

La passion s'amenuise, la vie change, les amis avec qui on échange ou échangeait passent aussi à autre chose.
On y revient alors par effet rebond, après des pauses plus ou moins longues... mais sans jamais vraiment pouvoir raccrocher le wagon qui file. Alors on vient juste sur le quai pour faire un signe. Pour dire continuez, tenez bon.

J'admire les gens ici qui s'accrochent, années après années, à transmettre cette passion et aider les recrues avec une volonté quasi intacte.

Mon premier post sur ce forum va bientôt avoir 10 ans: j'ai moi aussi été une recrue.
Pendant plus de 5 ans ensuite, j'ai croisé ici des personnes formidables, une passion communicative et, surtout, un magnifique esprit de camaraderie. J'ai essayé d'apporter ma pierre à l'édifice, avec un peu de réussite (ce qui me vaut d’arborer l'écusson «admin», titre aujourd'hui bien plus honorifique qu'autre chose ).
J'ai tenté de maîtriser le sujet de l'espresso, avec la volonté de le fouiller et de le renouveler. J'ai mené mon enquête de Baristorien, et tenté d'appréhender le sujet. Et à chaque fois j'ai trouvé de nouvelles pistes à suivre, me menant de plus en plus loin dans le passé. J'ai frappé à de nombreuses portes, y compris de grands archéologues du milieu, et j'y a rarement trouvé autre chose que de la bienveillance et des encouragements.
Quand je regarde en arrière, je suis impressionné de constater comment, en suivant ces pistes souvent soufflées par d'autres, et en me fiant à mon instinct, j'ai pu enchaîner plus d'une trentaine d'articles qui pourraient "facilement" faire un livre.
Mais le sujet est toujours en fuite.

Avec le recul on relit et on relie les évènements différemment. L'espresso est un sujet qu'on n'épuise pas.
Et plus ça va, plus j'ai l'impression que c'est lui qui m'a possédé.
Il y a des signes qui ne trompent pas.

C'est de cet alignement que je veux vous parler: 4 ans de pause depuis mon dernier article, portant sur une machine domestique sortie il y a exactement 70 ans et 10 ans, quasi jour pour jour, après mon premier post sur ce forum.
Ces trois dates ont un point commun.

Et le voilà, emballé dans un carton déposé devant ma porte.



Le jour où j'ai perdu mon odorat, aurai-je retrouvé mon flair ?

Quelle jolie rhétorique !!!

Est-ce qu'on peut compter sur Seb pour faire sa princesse?

Une princesse monégasque, je suppose?

Il joue avec nous; c'est un prototype de Decent, version mécanique, déniché dans une foire aux puces!

Il manque l’émoji du mangeur de pop corn
Mais j’ai hâte de lire la suite…

Mais peut-être devrais-je commencer par le début, en racontant l'histoire de ma première "vraie" machine espresso.
Celle qui m'a amené sur ce forum.

C'était une Brasilia Lady du 3e type, celui dont personne n'avait jamais entendu parler et que plus personne n'a jamais revu depuis.
Je n'y allais même pas pour elle, je cherchais un moulin pour ma fausse machine (avec filtre pressurisé). Je ne le savais même pas encore. Je veux dire... ni que j'avais une fausse machine, ni que je n'y allais pas que pour le moulin.

Alors voilà, j'ai téléphoné, j'ai pris rendez-vous avec Guy qui habitait à deux pas de mon boulot d'alors. Je me souviens de lui, il était très discret. Il m'a montré le moulin et pour la machine, et bien... elle ne marchait plus et on lui avait dit qu'on ne pouvait pas la réparer. Alors... si ça me disait.
Il ne m'a même pas dit à quel point c'était rare de trouver une Lady au Québec. Alors que, forcément, il le savait.

En fait c'est surtout sa femme qui m'a parlé. Elle me disait à quel point son mari était passionné de machine à espresso. Et, pendant que je me décidais à acheter moulin ET machine sans savoir dans quoi je me lançais, elle m'a pointé une autre machine espresso dans le coin de la pièce en me disant : regardez, il s'est même acheté une machine très rare qu'il a fait venir d'Italie. Est-ce que vous connaissez?

Je n'avais aucune idée de ce que c'était, ni de l'incongruité de voir une telle pièce de musée dans une maison de banlieue de la rive sud de Montréal. En fait Guy, qui souriait discrètement devant les remarques de sa femme, mi-honteux de sa passion dévorante, mi-fier qu'elle la lui laisse vivre et qu'elle le mette ainsi en valeur... en fait Guy, c'était moi.

Il souriait car il m'avait refilé son virus et je ne le savais pas encore.





Je sais, c'est le Covid, je délire certainement un peu mais pourtant, cette même machine, je peux maintenant l'apercevoir en ouvrant le carton... 10 ans quasi jour pour jour après ma visite chez lui.



Pas de doute, elle aussi a traversé le temps et est venue directement d'Italie.

Magnifique

Superbe histoire

Le suspence me paraît maintenant elektrisant, mais ce n'est sans doute qu'une fausse piste due à la forme de la base.
De plus, en se recentrant sur 1952, ça surtout rappelle une Reneka présentée par rotchitos.
Mais peut-être as-tu tout simplement eu envie d'agrandir la faemille avec un petit gros levier?

Naaaaan... vu la forme, c'est une Dedica de Delonghi!

On est toujours plus ou moins là mon ami.

^^ sympa cette devinette

Stella Gilda ?

J'avais laissé suffisamment d'indices, alors la voilà, emballée, déballée...





Et moi emballé, déboussolé.

J'ai dû ouvrir internet pendant que tout le monde regardait ailleurs. Y'a dû y avoir une faille temporelle.
Ou bien c'est qu'elle était pour moi.

Le tout premier modèle de machine espresso domestique, crée par le maître lui-même dans ses ateliers de Milan. Que j'aurais finalement payé moins cher que son prix original.





[Pour d'autres détails, voir «Ascenseur pour l'Espresso», Episode 30]

Enfin, pour être précis, le tout premier modèle de Gilda, présenté à la foire de Milan de 1952, avait l'interrupteur sur l'avant et fonctionnait en 160V. Celle-ci a l'interrupteur sur le côté et est en 260V, ce qui correspond aux versions sorties à partir de fin 1952. Il ne lui manque que la grille, la résistance fonctionne encore.

Ce qui m'a vraiment surpris c'est la taille de cette machine, que j'imaginais bien plus petite. Elle est en fait assez imposante pour une "petite", on s'en rend pas compte sur les photos disponibles ça et là, mais c'est flagrant quand on la place à côté de sa petite sœur.

Ah oui, une version un poil différente de celle présentée par Pascal:

https://expresso.1fr1.net/t9261-gaggia-gilda-1952

Ah enfin ! Voilà l'objet de ce fil de discussion !
Si tu as besoin d'un modèle pour la grille n'hésite pas

De quoi te réconcilier avec l’alu poli
Superbe machine! Je ne sais pas si, comme moi, en étant devant une vieille machine comme celle-là, vous essayez d’imaginer son histoire, ses propriétaires, les endroits ou elle a été utilisés… Cette machine a probablement été témoin de toutes sortes d’événements, des plus anodins aux plus dramatiques, de la tasse de café le lendemain d’une nouvelle rencontre à une scène de rupture, d’un ouvrier qui a apporté son savoir faire pour la fabriquer aux réparateurs qui l’ont - peut-être - entretenue. Bon, je me calme (j’espère que mon cas n’est pas trop grave).

Le fil d'alimentation a été changé aussi, non ? il semble manquer le passe câble.

pootoogoo a écrit:Enfin, pour être précis, le tout premier modèle de Gilda, présenté à la foire de Milan de 1952, avait l'interrupteur sur l'avant et fonctionnait en 160V. Celle-ci a l'interrupteur sur le côté et est en 260V

C'est particulier ce choix de câble sur le devant, tu sais pourquoi ils ont fait ça ? je ne trouve pas de photo avec l’interrupteur sur le devant ; le câble et l'interrupteur étaient permutés ou les deux étaient sur le devant ?

Le thermomètre est en bon état ?

"le câble et l'interrupteur étaient permutés ou les deux étaient sur le devant ?"
@Guillaume, Le câble est à l'avant et l'interrupteur sur le côté.
Mais le dessin du brevet montre un interrupteur à l'avant.



https://expresso.1fr1.net/t8601p300-galerie-des-machines-a-levie

C'est toujours un plaisir de voir un autre exemplaire de cette icône.

Merci pour toutes vos réactions.

Bon, effectivement le câble a été changé et, j'oserai dire, heureusement pour le test de résistance.



Pour ce qui est des différentes versions entre avril 52 et 53, il y a les documents d'archives et aussi les modèles répertoriés (puisque la date est poinçonnée sur la résistance).

Il y a d'abord eu l’interrupteur devant, avec deux cosses sur le devant pour le branchement (comme sur le premier encart publicitaire plus haut, datant d'avril 52), ou sur la publicité couleur du site de Mik, ou ici:



Puis il y a eu des modèles avec l'interrupteur sur le côté, en 160V (comme ici), en 220V, puis 260V (fin 52), comme on peut le constater sur le site de Francesco.

Il y aussi l'écusson qui est passé de gauche à droite avec l'adresse qui a changé de "via Carabelli" (jusqu'à Octobre 52) à "via Cadolini".

Après, je ne sais pas d'où vient ce choix du câble en avant, c'est assez étrange en effet.
Pour le thermomètre j'ai pas osé le tester car j'ai peur que l'aiguille soit collée sur le papier. Je vais démonter d'abord, je pense.


Sinon, merci Pascal, j'ai trouvé sur HB le dessin exact de la grille manquante.

J'adore la fine gravure tout autour de cette machine..

Ma Gaggia Gilda, ou plutôt son élément chauffant, affiche une date de fabrication de juillet 1952.
Elle est conçue pour 260 volts. Je peux donc l'utiliser sans problème avec les 230 volts habituels.
L'interrupteur sur le côté droit n'avait d'ailleurs pas de capuchon ou de cache en aluminium. Là aussi, il semble y avoir des différences.

Je trouve également intéressant que l'illustration de l'Annconce montre déjà une lance à vapeur pivotante, alors que celle-ci n'est apparemment apparue qu'un peu plus tard (à partir de 1953 ?). Pour autant que je sache, les premières versions avaient encore la lance rigide traversante. Ma machine en est équipée.

Je n'ai jamais vu de photo de Gilda avec l'interrupteur sur le devant. Jusqu'à présent, le câble d'alimentation est toujours passé par là, dans le boîtier.

Et du coup il sort que ton livre ? Plaisir de retrouver ta prose café , qui sublime la belle trouvaille !

Bon, la question qu'on se pose plus ou moins tous: est-ce qu'il fait du café, ce poussoir à saucisses?

Pas encore @pig mais les tagliatelles sont excellente.

@elive2000, pour le bouquin, c'est en friche... c'est un sacré boulot qui attend la sortie de mon marasme post-Québec, post-covid, post-tout ce que tu veux. Bref, c'est pas simple de se motiver.

@vectis, moi non plus je n'ai jamais vu de machines avec l'interrupteur devant (à part sur plusieurs publicités). Soit c'est un dessin préparatoire qui a été utilisé alors, soit il y en a eu tellement peu qu'aucune n'a fait surface.
Par contre dans le bouquin de Coffee Makers de Maltoni, il y a un modèle 220V avec écusson à gauche, interrupteur sur le côté et pas de sortie câble à l'avant (p. 626)...

M'est avis que tu saurais même nous sortir une collection, et qui serait une référence en la matière. J'en prends 10 d'avance en précommande !